L’éducation supérieure: penser le budget autrement qu’en termes de «band aid»

Marie-Josée Bourget, présidente du Syndicat des chargées et chargés de cours de l’Université du
Québec en Outaouais, campus de Saint-Jérôme et de Gatineau
Simon Chavarie, vice-président externe du Syndicat des professeures et professeurs du Cégep de
Saint-Jérôme
Judith Trudeau, vice-présidente du Syndicat des enseignantes et enseignants du Collège LionelGroulx


Les professeures et professeurs ainsi que les chargées et chargés de cours des collèges et de universités ont vécu une année sous le thème de « l’adaptation ». Le 13 mars 2020 restera une date charnière, puisque c’est à ce moment que les artisans de l’enseignement supérieur ont dû adapter leurs cours conventionnels, en présence, pour les traduire à distance. De l’enseignement où les repères sont connus avec une classe, des étudiantes et étudiants en chair et en os, des prestations théoriques, des activités pédagogiques, des corrections sur papier. En quelque deux semaines, il fallait revisiter l’ensemble de nos façons de faire.

Les enseignantes et enseignants se sont formés aux technopédagogies : ils ont suivi des formations sur Zoom, Moodle, Teams, ont appris à encapsuler le savoir et à corriger en ligne. Ils ont fait face à l’anxiété et à la détresse des étudiantes et étudiants, ont vécu l’isolement, ont dû composer avec des connexions Internet aléatoires, ont été compréhensifs, souples et « innovants ».

Reconnaissant la lourdeur de la tâche, la ministre Mc Cann a entendu les professeures et professeurs des cégeps en allongeant une annexe budgétaire à la hauteur de 25 millions pour « aider la réussite des étudiantes et étudiants ». Dans certains cégeps, cela a fait une différence, notamment par la diminution des personnes par classe. Pourtant, dans d’autres établissements, ces sommes ont été dépensées principalement dans l’achat d’équipements et pour du désinfectant de type Purell. Aucun montant n’a été alloué directement pour soulager la surcharge de travail dans les universités. Ce manque de reconnaissance fait mal et fragilise les artisans les plus précaires.

La pandémie a exacerbé des maux déjà présents en éducation supérieure : le décrochage, l’anxiété de la jeune génération face à la performance attendue, les inégalités inhérentes aux conditions de vie des étudiantes et étudiants.

Pour pallier ces maux, ce ne sont pas des montants à la pièce qu’il faut octroyer lorsque les crises surviennent, mais bien miser sur un financement stable à la hauteur de l’aspiration que nous avons pour la génération montante.

Ainsi, prioriser le retour à l’équilibre budgétaire est, selon nous, une avenue qui ne laissera pas de place à la résolution des problèmes engendrés par l’actuelle crise, au contraire. Nous souhaitons un dialogue ouvert sur les solutions à mettre en place et demeurons comme nous l’avons été depuis un an, disponibles pour soutenir l’enseignement collégial et universitaire.